Leave the Houmous alone !

Tartiflette de courgettes à la feta,
Choucroute de carottes,
Blanquette de veau à l’agneau et aux olives, …

Est-ce que ça vous embête ? Si vous avez un minimum de goût, normalement oui !
Maintenant vous savez ce que je ressens quand j’entends parler de houmous en 2020. Contrairement à beaucoup d’entre vous (ou alors la team Méditerranée est extrêmement puissante par ici), c’est un plat que je connais depuis ma naissance, qui est ancré dans ma mémoire, qui existe dans nombre de mes souvenirs. C’est un plat phare du Liban ; on le retrouve sur toutes les tables familiales et dans tous les restaurants. En soit, il n’est pas bien compliqué à préparer, il ne requiert pas de matériel particulier. Le hommos se contente de marier des ingrédients emblématiques de la cuisine libanaise : pois chiches, tahini, citron, ail et huile d’olive. Je vous en propose une recette classique plus bas, mais d’abord, j’ai quelques émotions à déposer dans les oreilles les plus courageuses !

De nombreux pays se disputent l’origine du hommos. Mais ce sur quoi ils s’accordent tous, c’est l’origine étymologique. Hommos signifie pois chiche en arabe et la purée que vous connaissez s’appelle en réalité hommos bi tahini, pois chiche à la purée de sésame si vous préférez. Puisque c’est un mot arabe, il n’existe pas de transcription officielle. Il semblerait qu’un consensus profite à houmous mais la prononciation libanaise me fait pencher plutôt vers hommos. Ce n’est pas le plus important, mais j’avoue personnellement grincer des gens quand je vois ou entends humus. Le humus, c’est de la terre. S’il vous plait quoi, un minimum de respect ! 😀

Depuis quelques années, le hommos connait un âge d’or. Tout le monde s’est mis à en chercher partout, les grandes surfaces ont sorti des barquettes absolument insipides, bourrées d’horreurs et de conservateurs, les vegan en ont fait leur meilleur ami (l’apport de protéines est intéressant) …
Le problème avec la mode, c’est qu’elle a tendance à tuer ou au moins noyer le phénomène même qu’elle promeut. Parce que pour 2-3 personnes qui se sont vraiment renseigné, on a un sacré océan de personnes qui se contentent de s’emparer de la chose et de se l’approprier. Souvent pour suivre le courant, les yeux fermés.

Houmous de carottes, de betteraves, de haricots, de spiruline, … J’ai tout vu passer. Finalement, on dirait que le Houmous, c’est comme la Bohème … ça ne veut plus rien dire du tout (promis la recette arrive bientôt) ! Quel respect est-ce qu’on peut sincèrement avoir avec la recette quand on n’en respecte aucun des ingrédients ? Houmous ne veut pas dire purée épaisse d’apéro. Si vous faites une purée d’avocat et de pois chiches pour tremper vos crudités, rien ne vous oblige à appeler ça un houmous. Je ne comprends pas l’obsession de l’appellation. Je veux bien tolérer quelques libertés mais pas celles qui dénaturent le produit de base. Le problème que j’ai, ça n’est pas le goût. Ces préparations sont peut-être très bonnes. Mais je n’aime pas cette légèreté intellectuelle qui consiste à prendre ce qui nous intéresse sans chercher à savoir de quoi on parle. Faites la recette au moins une fois normalement et ensuite vous pourrez la « revisiter ». Et si vous avez une idée nouvelle, vous pourrez même la baptiser. Mais ne venez pas embêter le hommos ! Est-ce que ça vous viendrait à l’idée de mettre du poulet et des poivrons dans le gratin dauphinois ? Ça ne serait plus du gratin dauphinois …

Si on a parfaitement le droit de prendre des libertés et de changer une recette, on ne peut pas en échange prétendre pouvoir lui donner le nom de la recette d’origine. Si on change vraiment, alors on change ! Rien n’empêche de dire « comme un … » ou « façon … ». Prenez le risotto par exemple. Si vous remplacez le riz, rien ne vous autorise à appeler votre plat un risotto. Mais on voit des créations comme le célerisotto ou les coquillettes façon risotto. On comprend l’inspiration, on comprend qu’on a emprunté le visuel ou la méthode de cuisson. Mais on reconnait par la même qu’on a affaire à un plat dérivé, une variation de la recette d’origine. Si vous voulez faire un houmous mais en remplaçant les pois chiches par des haricots blancs (et en gardant le reste des ingrédients !), je vous autorise donc à appeler ça : purée de haricots blancs façon houmous. Vous n’avez le droit de modifier qu’un seul ingrédient, ma tolérance a des limites !

Maintenant que j’ai pu vider ce que j’avais sur le coeur, on va pouvoir passer à la recette !
(Oui ! Enfin ! Qu’est-ce que c’était lourd ce blabla !)
Comme je vous l’ai dit plus haut, le hommos est un plat assez simple, plutôt facile à préparer. Tout le jeu est donc d’essayer d’en préparer un le plus abouti, le hommos parfait ! Au niveau du goût c’est personnel. Au niveau texture, si c’est granuleux ou croquant, vous avez objectivement raté. On cherche à réaliser la purée au bon goût de pois chiches la plus lisse possible, arrondie par le tahini (qui amène aussi une légère amertume), relevée par le jus de citron et la touche d’ail. Il n’y a pas d’huile d’olive dans le hommos mais elle est traditionnellement versée dessus au moment de servir.

Ingrédients :
– 500g de pois chiches SECS (pas en conserve ni en boite !)
(j’ai utilisé ceux de Maréchal Fraicheur qui sont top mais ceux de Markal (en magasins bio) sont très bien aussi il me semble)
– 1 cuillère à café de bicarbonate
– 1/2 verre (environ 100mL) de tahini (de préférence en épicerie orientale)
– 1 ou 2 gousses d’ail (je préfère 2 mais à vous d’adapter à votre goût)
– le jus de 2 ou 3 citrons (fraichement pressés ! Pas de bouteille par pitié, même si c’est écrit citrons bio de Syracuse pressés à la main, c’est NON)
– sel

Préparation :
– Faites tremper les pois chiches secs dans un saladier rempli d’eau pendant 24h dans l’idéal (ou sinon au moins 12h, la veille au soir pour le lendemain midi). Ils vont gonfler donc prévoyez bien votre coup 😉
– Égouttez les pois chiches puis remettez-les dans l’eau mais cette fois avec une cuillère à café de bicarbonate. Attendez 15 minutes, égouttez à nouveau et rincez.
– Mettez les pois chiches à cuire à feu moyen doux, à couvert, dans un grand volume d’eau. Pendant la cuisson, retirez l’écume qui se forme à la surface. La cuisson peut prendre 1h ou plus, ça dépendra vraiment de la nature des pois chiches et du trempage. On cherche à obtenir des pois chiches vraiment très cuits, qui ne résistent pas du tout sous la dent. Si vous enlevez trop tôt, votre purée ne sera pas aussi lisse. Et si vous aimez la perfection, vous pouvez retirer la peau des pois chiches. Normalement, elle s’enlève assez facilement.
– Quand les pois chiches sont cuits, gardez un peu d’eau de cuisson de côté, égouttez et envoyez les pois chiches au mixeur. Ajoutez l’ail râpé à la Microplane (la triche), écrasé au mortier (la traditionnelle) ou coupé en morceaux (la flemme). Toute la texture va se jouer maintenant donc mixez les pois chiches et l’ail pendant de bonnes minutes pour obtenir une purée vraiment lisse. Vous pouvez autoriser à votre robot quelques pauses s’il surchauffe.
– Une fois que vous avez obtenu une belle purée lisse, vous pouvez ajouter le tahini, le jus de citron en petit filet pendant que le mixeur tourne et le sel.
– Goutez et adaptez à vos goûts (plus de citron ? plus de sel ? plus de tahini ?). Si vous sentez que c’est trop sec, ajoutez un peu d’eau (de cuisson des pois chiches dans l’idéal). Le hommos a tendance à se raffermir un peu au frigo donc n’ayez pas peur qu’il soit un peu souple.
– Et maintenant que vous êtes super fiers de vous, on passe à la déco !

Pour la déco, vous êtes assez libres, le hommos se marie avec pas mal de choses. Traditionnellement, c’est huile d’olive et un peu de paprika ou piment. Pour ma part, j’adore saupoudrer un peu de Piment fumé Chipotle de chez Thiercelin, une marque d’épices que j’affectionne particulièrement. Ils ont un choix immense de produits, pourtant sélectionnés avec énormément de soin. Et pour l’huile d’olive, choisissez une très bonne huile d’olive vierge pleine de goût. Là, j’avais envie d’ajouter encore une touche d’agrume avec l’huile O’limone Rossu (aromatisée au citron Meyer) du Moulin Oltremonti. Une huile de Corse découverte chez l’excellent restaurant A Cantina !

Il y a quelques années, j’ai découvert avec beaucoup d’émotion le hommos bi lahmé, c’est à dire notre jolie purée surmontée de viande et de fruits secs (pignons de pin le plus souvent). J’ai vu passer aussi une version avec en plus des oignons rouges pickles et du sumac, ça doit être top. Si je me motive, j’essayerai d’en faire. En attendant, j’attends vos réalisations ! Montrez-moi vos beaux hommos lisses et respectueux de la tradition ! 😉

Et pour le dessert, si vous voulez rester dans la thématique libanaise, je vous ai proposé la recette du Mhallabiyé, une crème de lait à la fleur d’oranger, toute simple à réaliser.